lundi 31 mars 2014

RENCONTRE AVEC UN GRAND AUTEUR D’APRÈS-GUERRE


Une photo récente de Jean LOMBARD connu sous le nom de Max-André RAYJEAN, un des grands noms de la science-fiction populaire française, fournie avec amabilité par l'auteur lui-même. Comme la seconde présentée plus loin, il s'agit de photos EXCLUSIVES, montrant l'écrivain pour la première fois (les rares photos censées le représenter proposées sur internet sont en réalité la photo de Jean COCTEAU jeune et d'un inconnu - de la même manière que sa biographie est parfois confondue avec celle d'un auteur homonyme du siècle précédent... Il était temps de contribuer ici à ces quelques rectifications ).

Si certains auteurs de science-fiction français ont obtenu une forme de reconnaissance s'étendant parfois au-delà du genre, comme Gérard KLEIN, Philippe CURVAL, Michel JEURY, Jean-Pierre ANDREVON ou Pierre PELOT, nombre d'auteurs de l'après-guerre, qui ont contribué à diffuser dans notre pays un genre encore assez exclusivement anglo-saxon, et dont les représentants demeuraient alors encore fort peu connus sur notre territoire à l'exception d'Herbert George WELLS - l'oeuvre de H.P. LOVECRAFT a été à la même époque portée à la connaissance du public français par Jacques BERGIER - restent cependant encore largement ignorés des critiques, des anthologies et même des essais historiques sur le genre (même Jacques SADOUL évoqué récemment ne faisait que citer dans son "Histoire de la science-fiction moderne" le nom de Max-André RAYJEAN sans mentionner aucune de ses œuvres). Les productions de ces écrivains qui parurent pour l'essentiel aux éditions Fleuve Noir sont en effet presque systématiquement tenues pour des productions mineures, assimilées à des "romans de gare", destinées d'emblée à l'oubli et dont aucun chroniqueur littéraire digne de ce nom ne devrait se soucier. C'est un peu comme si, pour accéder tardivement à une respectabilité, encore souvent bien ténue, la science-fiction devait se délester, voire se purger, d'une masse considérable de textes qui seraient nécessairement mal écrits, puérils, stéréotypés et peu inventifs, soit sans qualité et sans intérêt. Ce dédain n'est pas sans rappeler celui s'attachant généralement aux magazines américains du temps de l'effervescence de la science-fiction dans les décennies 1920 et 1930 qu'on a appelé "l'âge d'or de la science-fiction", victimes d'un regard condescendant rétrospectif en raison notamment de la mauvaise qualité du papier leur ayant conféré le nom de "pulps" et de couvertures avec des illustrations privilégiant le spectaculaire, alléguant que, pour être une "vraie" littérature, la science-fiction devait se contraindre à une certaine épure, s'éloignant de tout ce qui peut la rattacher à une forme de divertissement paraissant "gratuit"; pourtant, cet "âge d'or" décrié a vu émerger, notamment sous la direction du directeur de publication John CAMPBELL, tous les auteurs du genre qui furent par la suite distingués et célébrés outre-Atlantique.

De la même manière, estimer que la totalité des romans qui furent publiés en France à partir de la décennie 1950 par la collection "Anticipation" éditée par Fleuve Noir ne méritent aucune considération au nom d'une étiquette qu'on lui a hâtivement accolée, paraît un ostracisme bien peu justifiable. N’en déplaise aux jugements hâtifs, nombre de ces écrivains font preuve d’une belle inventivité, et leur style, s’il privilégie l’efficacité aux fioritures, est tout à fait honorable. Parmi ces auteurs, on peut citer Maurice LIMAT, B.R. BRUSS, F.RICHARD-BESSIÈRE (Henri BESSIÈRE), Robert CLAUZEL, hélas tous disparus, Piet LEGAY, ou encore Max-André RAYJEAN. Ce dernier est revenu récemment d'actualité avec la parution de romans de science-fiction inédits chez l'éditeur "Rivière blanche" ( antithèse sémantique de Fleuve Noir), LE CYCLE D’ORGA, DEFI A LA TERRE/LE DIEU ARTIFICIEL, COMPLEXE 18/DIX SIECLES POUR DEMAIN, ainsi qu'un tome rassemblant deux récits fantastiques, MOMIE DE SANG/LE SECRET DES ROCHES NOIRES.


Enlèvement par des extraterrestres; une "rencontre du 3ème type" peu ordinaire ayant pour finalité d'enrichir en nouveaux spécimens le zoo interstellaire des Astors !

Né en 1929 à Valence dans la Drôme sous le nom de Jean LOMBARD - à ne pas confondre avec un écrivain homonyme du siècle précédant - l'écrivain a fait publier, sous l'identité de Max-André RAYJEAN, 67 romans dans la collection « Anticipation » aux éditions Fleuve Noir. Admirateur de Max-André DAZERGUES, dont il reprend le prénom composé pour son identité de plume, il commence par faire paraître des œuvres d’aventures pour la jeunesse qui s’inspirent de ses écrits, puis écrit des romans policiers et des scénarios de bandes dessinées pour la jeunesse, lesquels atteindront le nombre de 300. Mais c’est à partir de 1956 qu’il s’oriente vers la science-fiction au travers de la collection « Anticipation » aux éditions "Fleuve Noir", y transcrivant son intérêt pour la science, sans cependant verser dans un scientisme trop manifeste. Max-André RAYJEAN nous promène jusque dans les mondes les plus lointains, à l’échelle du cosmos, sachant, au-delà de la conjecture intellectuelle stimulante, nous communiquer le vertige métaphysique, la solitude qui émane de ces espaces sans fin et d'un temps étendu jusqu'à l'infini. Il s'attache également avec conviction à dépeindre des êtres pensants très différents de l'homme, comme les unicellulaires géants, tels les Mollutors d'ÈRE CINQUIÈME qui succéderont à l'humanité dans le lointain avenir, ou ceux venus d'une autre planète du PÉRIL DES HOMMES et de RETOUR AU NÉANT (même si un personnage de BASE SPATIALE 14 postulait à l'inverse que la taille que pouvait atteindre le protoplasme d'une cellule était limité), parfois aux limites du biologique, tels que l'entité éponyme de L'ARBRE DE CRISTAL, les extraterrestres constitués de sphères dans PRISONNIERS DU TEMPS ou encore ceux composés d'énergie pure des FEUX DE SIRIS. Il parvient à faire ressentir l'étrangeté radicale que présentent ces êtres issus d'une évolution très éloignée de la nôtre, au cycle vital souvent fort singulier, tout en s'attachant à faire comprendre leur représentation du monde et même partager leurs perceptions et leur intériorité; sur ce point, il pourrait être vu comme un digne héritier du premier grand précurseur de la science-fiction, lui même francophone, Joseph-Henri BOEX dit ROSNY Aîné. La puissance narrative de l'auteur permet dans des romans comme LA ONZIÈME DIMENSION, irruption d’un autre univers dans le nôtre au sein duquel les besoins matériels n’ont plus lieu d’être, ou LE CYCLE D’ORGA, une catastrophe dans les Andes qui évoque d’abord une coulée de boue avant de s’avérer bien autre chose qu’un phénomène géologique classique, de pousser une idée jusqu’à ses ultimes prolongements, sans cesser pour autant de demeurer convaincant en dépit de la survenue d'événements toujours plus extraordinaires. BASE SPATIALE 14 anticipe quant à elle la série télévisée INVASION de Shaun CASSIDY, avec des envahisseurs extraterrestres, des "cellules universelles", qui ont si bien copié les humains auxquels ils se sont substitués qu’ils réclament pour eux aussi le respect de « leur » humanité nouvelle.

Les rejetons de l'Arbre de cristal évoquant des bulles de savon.

Victimes de la mode, les romans de Max-André RAYJEAN récemment publiés par Rivière blanche furent jadis refusés par Fleuve noir, qui désirait renouveler la collection en rompant avec les auteurs qui avaient fait sa renommée. Cette actualité fournit un prétexte idéal pour, à défaut de pouvoir entrer dans le détail d'une oeuvre volumineuse, du moins évoquer sa carrière et son intérêt pour la science-fiction. On ne peut qu'exprimer toute notre gratitude pour celui qui, considéré comme l'un des auteurs les plus secrets de la collection Anticipation, a bien voulu répondre à un petit questionnaire, pour notre plus grand plaisir et celui des lecteurs qui nous font la grâce de nous lire.

- Monsieur LOMBARD, quelle est l’origine de votre pseudonyme, faut-il y voir une allusion à l’auteur de récits fantastiques Jean RAY ?
M.-A. RAYJEAN : Rien à voir avec Jean RAY. Simplement, j’ai une sœur aînée qui s’appelle Raymonde et qui m’a encouragé à écrire. Alors j’ai allié nos deux prénoms : RAY(monde) et JEAN. Aussi simple que cela !
- L’éditeur vous a demandé de réécrire votre premier roman de science-fiction. Comment un écrivain parvient-il à se réapproprier son œuvre une fois le processus mené à son terme ?
M.-A. RAYJEAN : Je n’ai pas eu trop de mal à réécrire mon histoire car le scénario restait le même. Il n’était question que d’un style d’écriture. Exemple : « J’avais peur. Peur et troublé à la fois… ». L’éditeur n’aimait pas trop cette pose répétitive. J’ai du faire des coupures ! C’était ATTAQUE SUB-TERRESTRE.
- Trouviez-vous toujours vos idées de la même manière et quelle en était l’origine ( conjecture rationnelle basée sur une lecture scientifique, ou un concept, idée visuelle d’une scène inspirant une intrigue, voire même rêve ? )
M.-A. RAYJEAN  : Beaucoup dans une lecture scientifique telle que « Science et vie » ou « Science et avenir ». Mais les idées émanaient aussi des neurones du cerveau. L’homme est doté d’une imagination, alors à lui d’inventer ! ( voir CHOCS EN SYNTHÈSE, L’ULTRA-UNIVERS, LA ONZIÈME DIMENSION.. )


Cap sur une nouvelle dimension qui tient tous ses promesses.

- Vous est-il déjà arrivé de fixer des limites à votre imagination au nom de la vraisemblance scientifique ?
M.-A. RAYJEAN : Pas précisément. L’imagination n’a vraiment pas de limite rigoureuse. Je pense que chaque individu a sa « propre » imagination, donc il existe forcément une limite personnelle… et indéfinissable ( voir LES FORÇATS DE L’ENERGIE, PRISONNIERS DU TEMPS, CELLULE 217, etc.. )
- Comment parvenez-vous à obtenir la longueur désirée du texte ? Faites vous un découpage synoptique détaillé ?
M.-A. RAYJEAN : Facilement. La longueur d’un texte est fonction du nombre de pages, jadis dactylographiées à la machine à écrire. La collection « Anticipation » comptait une centaine de ces pages. Il n’existait pas, en fait, de rigueur mathématique.
- A la lecture du CYCLE D’ORGA, je me suis demandé jusqu’à la fin quel serait le destin des principaux protagonistes. Connaissez-vous à l’avance le sort de vos personnages ou vous arrive-t-il de n’envisager le destin de ceux-ci qu’au fur du déroulement de l’intrigue ?
M.-A. RAYJEAN : Pour les romans, j’ai toujours plus ou moins tracé un scénario complet avant de commencer la rédaction. Il m’arrivait parfois de modifier ce scénario en cours d’écriture ( rarement toutefois ). Par contre, pour le texte des bandes dessinées, je plongeais souvent dans l’inconnu en modifiant au fur et à mesure le scénario, selon l’imagination du moment !


La couverture pétrifiante - le lecteur découvrira que l'expression est appropriée - du Cycle d'Orga, roman prenant, honteusement laissé de côté par l'éditeur d'origine, jusqu'à ce que les promoteurs de la collection Rivière blanche le tirent du néant !


- Conserviez-vous plutôt un regard assez distancié vis-à-vis du processus de narration, en tant qu’orchestrateur de l’intrigue, ou vous arrivait-il de vous impliquer dans l’écriture au point de vous sentir pénétré du climat d’angoisse au moment où vous le dépeigniez ?
M.-A. RAYJEAN : Alors là, vous abordez un problème de sensibilité qui frôle la psychanalyse ! Je ne me suis quand même jamais fait peur, même dans mes romans « Angoisse »… Sinon j’aurais fait des cauchemars !
- En dehors des romans policiers que vous auriez aimé écrire mais pour lesquels vous n’avez pas obtenu l’aval des éditions Fleuve noir qui désiraient vraisemblablement conserver pour la série « Anticipation » un de leurs auteurs-phares, aviez vous une totale liberté pour le choix des sujets et leur traitement, ou l’éditeur et les comités de lecture vous demandaient-ils de suivre certaines contraintes ou prescriptions ?
M.-A. RAYJEAN : Oui j’avais une totale liberté des sujets. Au début, avec François RICHARD comme directeur, je lui adressais plusieurs scénarios et je lui demandais de renvoyer la liste avec son classement personnel. Je développais d’abord le sujet n° 1, puis le numéro 2, etc… Avec Patrick SIRY, cette habitude fut abandonnée. Hélas !!!
- Quelles sont parmi vos œuvres celles que vous souhaiteriez le plus voir accéder à la postérité ( même si les rééditions de la collection « Les lendemains retrouvés » ont déjà contribué à proposer des romans anciens à de nouveaux lecteurs ) ?
M.-A. RAYJEAN : Difficile de choisir pour l’auteur. Mais j’ai une petite préférence pour le premier roman de chaque série que j’ai créée. Exemple, les grands reporters ( Joël Maubry, Joan Wayle ), Commandant Jé Mox, série Mac Kerreck,….
- Que répondriez-vous aux détracteurs du genre qui estiment qu’il n’y a pas d’intérêt à imaginer le futur, car l’évolution de plus en plus accélérée de la technologie, chaque découverte étant susceptible d’en entraîner d’autres inattendues, interdirait toute projection à long terme en la matière ?
M.-A. RAYJEAN : Ces détracteurs ont peut-être raison. Mais justement, les nouvelles technologies à ( voir « Science et vie » ) appellent un futur que l’on cerne à peu près. Exemple : facile d’imaginer une puce électronique introduite dans le cerveau dès la naissance de façon à « suivre » l’individu à la trace et de modifier son comportement par le biais d’impulsions. Une robotisation en somme !
- Et que pensez-vous des attaques des critiques littéraires qui, estimant que la science-fiction est une littérature d’idées, lui reproche de délaisser le style et de se contenter de personnages unidimensionnels ?
M.-A. RAYJEAN : Je n’en pense rien, car chaque critique a le droit de critiquer ! Je ne vois pas un auteur de science-fiction gagner le Goncourt, c’est sûr ! Mais chaque genre possède ses lecteurs. La littérature est multiple !
- En tant qu’auteur ayant aspiré à écrire des romans policiers, pensez-vous que le mode de conjecture rationnel de la science-fiction peut restreindre l’auteur quant à la description de comportements humains irrationnels, contrairement au genre policier naturellement enclin à restituer des faits criminels bruts parfois difficiles à appréhender, comme la violence gratuite de nombre de faits divers ?
M.-A. RAYJEAN : C’est une question colle !!!
- Par ailleurs, comment perceviez-vous le fait qu’au sein même de la science-fiction, les auteurs du Fleuve noir n’étaient généralement pas perçus à la juste mesure de leur travail, mais catalogués comme auteurs de seconde catégorie, généralement ignorés des études sur le genre ? Le regrettiez-vous dans une certaine mesure, ou avez-vous toujours estimé que la seule reconnaissance du lectorat était une gratification suffisante, comme l’affirmait votre confrère Maurice LIMAT  ( et aussi, en dehors de la science-fiction, par Frédéric DARD, dont vous avez fait la connaissance ? )
M.-A. RAYJEAN : J’ai essayé chez Denoël ( collection Présence du futur ). Ca n’a pas marché ! J’ai bien senti que chez Denoël, on nous prenait pour une catégorie d’auteurs secondaires. Au Fleuve noir, nous écrivions de la littérature « populaire », peut-être plus « simpliste ». N’empêche, les tirages de la collection prouvaient le succès.

Max-André RAYJEAN devant sa machine à écrire au temps de sa collaboration à Fleuve Noir (autre photo exclusive).

- Aviez-vous des contacts avec les autres auteurs d’anticipation de Fleuve noir et pouvez-vous nous raconter des anecdotes à leur sujet ? Jimmy GUIEU quant à lui était-il considéré comme un auteur plus particulièrement singulier, dans la mesure où il n’hésitait jamais à affirmer que ses récits étaient basés sur des faits réels émanant de l’ufologie ( l’étude des phénomènes spatiaux non identifiés, appelés O.V.N.I. en langue française ) ?
M.-A. RAYJEAN : Très peu, juste des contacts par l’intermédiaire de quelques lettres, entre confrères de la même édition. Avec LIMAT, surtout. Quant à Jimmy GUIEU, s’il croyait vraiment aux soucoupes volantes, c’était son droit. Mais des faits réels sur l’ufologie, j’en doute. Dans ses lettres amicales, il ne m’a jamais parlé de sa terrible passion pour les O.V.N.I.
- Les auteurs de la science-fiction française des années 1950 ont tous été à juste titre admirateurs de la science-fiction américaine, mais savez-vous pourquoi peu paraissent, à la différence sans doute de Robert CLAUZEL, avoir été marqués dans une certaine mesure par l’anticipation de langue française d’avant guerre comme ROSNY Aîné ou Maurice RENARD ?
M.-A. RAYJEAN : Une vraie colle que vous posez ! Les Américains ont envahi la littérature française au point de la submerger au point de faire oublier ROSNY Aîné ou Maurice RENARD ! Le Fleuve noir a été heureux d’équilibrer cette déficience en publiant la collection « Anticipation » avec des auteurs français. Un pari qu’ils ont gagné ! D’accord, au début, on s’est inspiré des Américains, mais chacun, ensuite, a mis sa personnalité dans ses romans.
- Savez-vous s’il y’a eu des tentatives de traduire en d’autres langues les auteurs du Fleuve noir, et n’avez-vous pas quelque regret de n’avoir pas été lu aux Etats-Unis, ce qui aurait la consécration logique pour les auteurs de la collection ?
M.-A. RAYJEAN : « Anticipation » a été traduite en plusieurs langues : italien, espagnol, portugais, etc.. Jamais de traductions aux Etats-Unis parce qu’en affaires, les Américains sont plus forts que les autres ! C’est leur mentalité de dominer le monde. Une preuve ? Vous avez vu le film INDEPENDANCE DAY ? Eh bien, c’est eux qui ont sauvé le monde ! Du nationalisme béat en somme.
- Vous avez eu l’occasion de rencontrer Frédéric DARD, célèbre auteur des aventures policières de SAN ANTONIO, dont vous appréciez l’humour ; regrettez-vous de pas avoir eu l’occasion d’instiller une touche humoristique dans vos romans, celle-ci étant souvent difficilement conciliable avec la tentative de dépeindre un monde imaginaire de manière crédible ?
M.-A. RAYJEAN : Ah, Frédéric DARD. Il a commencé sa carrière dans la petite collection « Le Glaive » d’un éditeur lyonnais. J’ai eu la chance d’y publier aussi mon premier roman… policier ! DARD est né à Bourgoin dans l’Isère et moi à Valence. Donc pas très loin…
Bien sûr, j’aurais pu introduire de l’humour dans mes ouvrages. Il y’a eu de l’ « heroic fantasy ». Ca ne m’a jamais tenté. J’ai pris la science-fiction très au sérieux, comme une sorte de prédiction de l’Avenir ( un critique du « Dauphiné libéré » a trouvé une « pointe d’humour » dans mon roman L’AGE DE LUMIÈRE, paraît-il !).
- Vous avez écrit des romans fantastiques ancrés dans la culture régionale. Considérez-vous de votre point de vue qu’il y’a une différence de degré ou bien de nature entre science-fiction et fantastique – beaucoup d’auteurs abordent ces deux genres de l’imaginaire ?
M.-A. RAYJEAN : Les deux genres diffèrent. La S-F traite d’une imagination axée sur le futur. Le fantastique se résume à des aventures diaboliques, où se mêle souvent l’épouvante. L’homme aime les mystères, les Dieux, le Diable, l’Au-delà. Donc l’irréel. Adapter un « Angoisse » dans un environnement régional est une volonté toute personnelle. Oui, j’aurais aimé être un auteur « régional ».
- Y’a-t-il des films de science-fiction qui vous aient plu particulièrement ? Ne pensez-vous pas que les images de synthèse, en dématérialisant l’imaginaire, font actuellement perdre à la science-fiction ce piment excitant de jeu avec le réel au travers d’un visuel désincarné ? Auriez-vous aimé être adapté au cinéma, ou estimez-vous que les nombreuses bandes dessinées dont vous avez écrit le scénario équivalent un peu à la visualisation de votre univers ?
M.-A. RAYJEAN : Pas particulièrement. Leurs auteurs se livrent à un spectacle axé principalement sur le trucage et les effets spéciaux. L’idée ne vole pas bien haut en général.. Un bon point pour LE PRIX DU DANGER ou I COMME ICARE. En tous cas, je n’ai jamais pensé à des adaptations pour le cinéma. ATTAQUE SUB-TERRESTRE et BASE SPATIALE 14 restent mes deux seuls romans S-F publiés en B.D. Par contre, mes B.D. pour enfants m’ont fait plaisir.


Réédition au titre des classiques de la série de BASE SPATIALE 14, qui fut également adapté en bande dessinée chez Aredit (ci-dessous) au travers des dessins de Jacques GERON (décédé à l'âge de seulement 43 ans le 30 octobre 1993).




- Avez-vous lu des romans d’auteurs plus récents, et estimez-vous en ce cas qu’ils diffèrent de ceux de votre époque ( en laissant peut-être une trop grande part à des intrigues - plus ou moins - sentimentales, en recourant trop systématiquement à l’emploi de mots inventés pour figurer des langues étrangères, susceptibles de lasser le lecteur, etc… ) ?
M.-A. RAYJEAN : Franchement, après « Anticipation » du Fleuve noir, j’ai décroché un peu de la S.-F. parce que j’ai vu saborder une collection qui marchait. Sans doute la nouvelle S.-F. diffère de la vague 1950-1980. Elle paraît plus « psychologique » et s’éloigne de la littérature populaire. Mieux ou prou ? Aux lecteurs de le prouver.                              - D’où tiriez vous votre inspiration pour inventer les formes de vie extraterrestres les plus variées; avez-vous parfois eu recours à des croquis pour visualiser ces êtres d’un autre monde ?
M.-A. RAYJEAN : Les extraterrestres mis en scène dans mes romans sont en effet très nombreux et de formes diverses. Ma série des Jé Mox, par exemple, comporte 16 titres* dont chacun montre différents types de vie intelligente. C’est ma série préférée, la plus riche en formes de vie extraterrestres. Ce sont à peu près treize structures extraterrestres vivant en communauté et possédant une civilisation souvent plus ou moins évoluée ( souvent plus que les hommes ! ) qui font face à Jé Mox et son équipage du Cos-200, le vaisseau de secours du centre spatial installé sur Ter-8 ( le huitième bastion terrestre édifié dans la galaxie ). Je n’ai jamais dessiné un croquis de mes extraterrestres. Seule l’imagination du moment me guidait. Rien, ne prouve que des êtres intelligents aient besoin d’une tête, de bras, de jambes. Les créatures unicellulaires, les microbes, les virus, ne sont t-ils pas doués d’intelligence ? Question à méditer. 




Quelques tentatives de représenter des formes de vie extraterrestres imaginées par Max-André RAYJEAN : la masse grise, faussement placide, de BASE SPATIALE 14 représentée par Jacques GERON pour l'adaptation en bande dessinée du roman (en haut), et deux essais de concrétisation d'une créature des GERMES DE L'INFINI (illustration originale, l'auteur doit être crédité pour toute reproduction, usage commercial proscrit sans autorisation de l'auteur).

Croyez-vous que l’humanité sera un jour réellement en mesure d’entrer en contact avec une autre civilisation ?
M.-A. RAYJEAN : Si vous voulez mon avis sur les extraterrestres, je crois sincèrement qu’ils existent, quelque part dans l’Univers, mais qu’aucun n’est capable de voyager dans l’espace interstellaire car il faudrait vaincre des distances de centaines d’années lumière.. inouï ! Le voyage dans la quatrième dimension (qui abolit les distances) est la ressource de la science-fiction et c’est bien pratique pour un auteur ! Mais pas pour un super technicien qui aura déjà bien du mal à inventer un moteur photonique pour se propulser à la vitesse de la lumière. Cela semble déjà hors de portée !!
- Pensez-vous que l’intelligence soit un phénomène très aléatoire, ou que celle-ci soit relativement répandue dans l’univers ?
M.-A. RAYJEAN : C’est une question à laquelle on ne peut pas répondre pour la raison qu’on ne connaît pas jusqu’où peut aller l’ « intelligence ». Toute forme de vie est intelligente. L’homme, l’animal, les végétaux, les microbes, les virus, sont intelligents ! Exemples, TERROM, AGE UN** ou ROUND VÉGÉTAL.


LE VOYAGE FANTASTIQUE? Non, l'illustration de couverture de l'épopée cosmique RETOUR AU NÉANT de Max-André RAYJEAN, un auteur très intéressé par le monde microscopique, au sein de l'oeuvre duquel on retrouve microbes et protozoaires géants. 

- Peu d’auteurs sont parvenus à évoque de manière relativement convaincante la vie dans un univers du nôtre. Quels conseils donneriez-vous à un auteur qui s’aventurerait sur ce terrain et quelles règles devrait-il suivre pour demeurer crédible ?
M.-A. RAYJEAN : La question rejoint un peu la précédente. L’homme n’a encore jamais rencontré un « extraterrestre ». Pour rester crédible, la vie dans un univers différent se conçoit comme la vie sur la Terre ( hommes, animaux, plantes, microbes… ). C’est déjà un bel échantillonnage de vies différentes. L’homme et sa science ne sont pas en état de répondre à cette question primordiale : comment envisage-t-on la vie dans un univers différent ?
C’est donc aux auteurs de science-fiction de l’imaginer. Mais « imagination » ne rime pas forcément avec certitude ( voir mes romans L’ULTRA-UNIVERS et SOLEILS : ÉCHELLE ZERO*** ).
Pour clore le débat, je pense que la présence de la vie sur la Terre, son origine, sont hors de portée de notre imagination. Qui prouve l’existence d’un SEUL univers ? univers parallèles ? Micro-univers ? Ultra-univers ? Ou des univers imbriqués les uns dans les autres ?
- Merci M. LOMBARD/RAYJEAN pour cet entretien exclusif, ce fut un grand honneur, et je ne peux douter que de nouvelles générations de lecteurs de science-fiction continueront à apprécier vos romans.


* PRISONNIERS DU TEMPS (1970), CELLULE 217 (1971), L’ARBRE DE CRISTAL (1972), L’AUTRE PASSE (1972), LA REVOLTE DE GERKANOL (1973), LE SECRET DES CYBORGS (1974), BARRIÈRE VIVANTE (1975), LES GEANTS DE KOMOR (1976), LES GERMES DE L’INFINI (1976), LES METAMORPHOSÉS DE SPALLA (1977), LE PIEGE DE LUMIERE (1977), LA CHAINE DES SYMBIOS (1978), LES MAITRES DE LA MATIERE (1979).

** Le roman se déroule après un cataclysme, la terre est dominée par plusieurs espèces d’insectes sociaux qui s’affrontent, et qui utilisent les êtres humains comme esclaves, jusqu’à ce que ceux-là découvrent la cité de Terrom, protégée par des androïdes, et entreprennent la reconquête du monde.

*** Il s’agit de deux romans liés dans lesquels des expériences sur la matière aboutissent à des immersions dans l’infiniment petit, puis l’infiniment grand. Dans le premier, des scientifiques de la planète Errêt créent un univers miniature qui se révèle habité et se met à croître au point de menacer le système solaire de son créateur; les deux peuples sont contraints de chercher un nouveau système solaire pour survivre. Dans le second, un macro-univers est engendré et quatre chercheurs qui s’y sont fait transférer se trouvent accidentellement dématérialisés en pure force électro-magnétique dépourvue de forme et perdent leur conscience individuelle; craignant de détruire le système solaire comme dans l’expérience précédente, ils se font envoyer dans l’espace. Ils arrivent sur un monde inhospitalier. Finalement, leurs êtres se changent en particules d’énergie, lesquelles seront à l’origine de l’apparition de la vie sur la Terre. D’autres romans de l’auteur du cycle Joé Mox jouent aussi sur la taille : dans CELLULE 217, des hommes sont miniaturisés pour pouvoir être insérés dans des cellules qu’ils sont appelés à contrôler, et dans LES GEANTS DE KOMOR, une autre expérience extraterrestre augmente la taille d’humains.

Le site de Rivière blanche : 
http://www.riviereblanche.com/

Les romans de Max-André RAYJEAN: 
http://www.riviereblanche.com/cycle.htm
http://www.riviereblanche.com/complexe.htm
http://www.riviereblanche.com/defiterre.htm

Nous sommes redevables à Philippe WARD, écrivain renommé et directeur de collection de "Rivière blanche" qui a donné la possibilité d'entrer en contact avec l'écrivain; nous espérons pouvoir le retrouver prochainement en ces pages pour nous entretenir avec lui des créatures mythiques, plus particulièrement de celles des légendes basques qui lui sont chères.


LECTURE COMPLÉMENTAIRE

On lira aussi à titre complémentaire sur l'auteur ce résumé rédigé par l'Oncle Paul qui l'a signalé à notre attention :

http://leslecturesdelonclepaul.over-blog.com/article-rayjean-max-andre-un-portrait-124472662.html

L'auteur évoque aussi deux de ses romans, changeant agréablement des commentaires souvent sommaires et abusivement dépréciatifs qu'on trouve habituellement sur l'auteur :

http://leslecturesdelonclepaul.over-blog.com/article-max-andre-rayjean-operation-etoile-124535785.html
http://leslecturesdelonclepaul.over-blog.com/article-max-andre-rayjean-le-cycle-d-orga-124467471.html

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On avait évoqué récemment le réalisateur du VOYAGE FANTASTIQUE DE SINBAD, Gordon HESSLER, à l'occasion de l'hommage consacré en juin 2013 à Ray HARRYHAUSEN; le cinéaste vient à son tour de disparaître le 19 janvier 2014.

A la fin de l'année précédente, le 14 décembre 2013, s'est éteint l'acteur Peter O'TOOLE. Surtout célèbre pour avoir interprété le personnage historique éponyme du film LAWRENCE D'ARABIE, il avait aussi, toujours dans le genre historique, livré des compositions saisissantes dans la série MASADA, en compagnie du non moins brillant David WARNER, et dans LA NUIT DES GENERAUX. Dans le domaine fantastique, il avait incarné un écrivain féru de mystérieux dans PHANTOMS, tiré du roman de Dean KOONTZ, traitant d'une monstrueuse créature immémoriale, dont l'apparition finale fut malheureusement coupée au profit d'une bien triste animation infographique.

En matière de littérature de l'imaginaire, mentionnons pour mémoire le décès le 18 mars 3014 de l'écrivain américain Lucius SHEPARD; l'écrivain de science-fiction Christopher PRIEST (LE MONDE INVERTI) lui a consacré un hommage biographique : http://www.theguardian.com/books/2014/mar/26/lucius-shepard



samedi 26 octobre 2013

EN SOUVENIR DE DALE KUIPERS



Le nom de Dale KUIPERS n'est pas tout à fait inconnu de ceux des lecteurs qui ont apprécié sur ce site le long hommage en trois volets consacrés pour le trentième anniversaire de sa sortie à un des chefs-d'œuvre longtemps les moins reconnus du cinéma, THE THING de John CARPENTER; il fut en effet provisoirement associé au projet, et son anniversaire ainsi qu'une actualité récente donnent l'occasion en complément de l'évoquer ici.

Cet artiste américain du Wisconsin, né le 26 octobre 1947, a développé ses capacités artistiques dès sa prime adolescence. A l'âge de 11 ans, une dame âgée, Mademoiselle de Woolf, qui avait remarqué ses dons, lui demanda de réaliser des centaines d'illustrations pour représenter ses propriétés, ce qui contribua à exercer ses talents. 

L'artiste précoce dans la cave de ses parents aux côtés d'un modèle de tyrannosaure pour son film Infant Earth sur l'évolution de la vie sur notre planète.

Dale Kuipers devenu un jeune homme.

Un pastel (le mode d'expression favori de Dale KUIPERS) qu'on pourrait prendre pour une photo.

A la même époque, il commençait à sculpter des dinosaures et réalisa un film d'animation avec ses modèles animés image par image, INFANT EARTH, équivalent du projet inabouti du jeune Ray HARRYHAUSEN, EVOLUTION, représentant l'histoire de la vie sur notre planète, depuis les premières formes unicellulaires jusqu'aux poissons et aux dinosaures. Un autre projet d'animation réalisé avec l'aide d'un étudiant, Chester WALLACE, se situait sur la planète Vénus riche en dinosaures.

Une scène d'attaque d'un grand dinosaure par un groupe de plus petits dessinée par Dale KUIPERS qui annonce étonnamment le final du film JURASSIC PARK. 

Le jeune artiste dans son atelier.

L'artiste à 17 ans réalisant un modèle de monstre grandeur nature dans sa cave. Il récupérait tout matériau inutilisé tels que des sachets en plastique (dont William BRYAN fera également grand usage pour la compagnie XFX de Steve JOHNSON), bourre, cintres, tapis, ampoules, précisant qu'il n'avait que la peinture à acheter.

Dale KUIPERS fut le concepteur de différentes maisons hantées plongeant le visiteur dans une atmosphère d'épouvante, créant notamment quarante monstres pour une attraction située sur l'île de Mackinac, "le Théâtre hanté de l'île" ( Haunted Theatre Mackinac ). Il conçut également des costumes pour diverses occasions, en particulier ceux d'un gorille, d'un cyclope cornu inspiré de celui animé par Ray HARRYHAUSEN dans LE SEPTIÈME VOYAGE DE SINBAD (THE SEVENTH VOYAGE OF SINBAD) et de personnages des bandes dessinées éditées par Marvel comme Hulk et l'"Homme-Chose" (The Man-Thing). 

L'Homme-Chose puissamment restitué par Dale KUIPERS.

Un démon ailé au Mackinak Theatre.

L'artiste a affirmé être aussi l'auteur de la nouvelle version plus réaliste d'une créature connue sous le nom de "l'homme de glace de Minnesota", mannequin aux allure de Néandertalien, que le passionné des phénomènes occultes Ivan SANDERSON lui avait commandé afin de le montrer au public à l'intérieur d'un bloc de glace dans une attraction itinérante en le présentant comme un spécimen réel de "Bigfoot". Le célèbre cryptozoologue Bernard HEUVELMANS jugea si convaincante cette création que, bien qu'il ne fut jamais autorisé à l'examiner en détail, il affirma sa certitude qu'il s'agissait d'un véritable hominidé rescapé de la préhistoire, au risque des inévitables railleries de la communauté scientifique qui mit à mal sa réputation de zoologiste.

Le chaînon manquant supposé, vu ici sans la glace qui le recouvrait ordinairement, spécimen qui déchaîna les passions sur le sujet des "hommes sauvages" - à l'image de la célèbre "autopsie de l'extraterrestre de Roswell" dans celui de l'ufologie - et constituait un des échantillons du portfolio de Dale KUIPERS.

Il avait aussi occupé la fonction de directeur artistique sur une production de 1978 réalisée dans l'état du Wisconsin, THE ALPHA INCIDENT, un thriller de science-fiction relatant une infection causée par un microbe ramené de l'espace par une sonde conçu comme un huis-clos dans un train. Lorsqu'une équipe du studio Universal se rendit sur l'île pour y tourner la romance fantastique de QUELQUE PART DANS LE TEMPS (SOMEWHERE IN TIME) mettant en vedette Christopher REEVES, Dale KUIPERS contacta le département des effets spéciaux et obtint au vu de ses créations pour le Théâtre hanté des lettres de recommandation. 

De retour à Green Bay, Dale KUIPERS adressa des portfolios de ses réalisations accompagnés des lettres aux grands studios, et quelques semaines plus tard, il reçut un appel téléphonique de Roy ARBOGAST, crédité notamment pour le requin mécanique des DENTS DE LA MER (JAWS) du film de SPIELBERG, qui recherchait un sculpteur connaissant les dinosaures. Ainsi, Dale devint sculpteur sur la comédie L'HOMME DES CAVERNES (CAVEMAN), qui fait évoluer des hommes préhistoriques au milieu de créatures du mésozoïque. Une rumeur prétendait d'ailleurs que Dale KUIPERS aurait pris quelque part à la création d'un dinosaure ventripotent de CAVEMAN dont il indiquait humoristiquement constituer le modèle en raison de ses problèmes de diabète responsables de sa prise de poids, qui lui causèrent quelques soucis sur le tournage; cependant, le célèbre animateur Randall William COOK nous a assurés que cette anecdote était fantaisiste, l'animal ayant été totalement conçu par Jim DANFORTH, qui engagea l'artiste anglais Roger DICKEN ( les premiers stades de la créature de ALIEN) pour l'assister. Jim DANFORTH, suite à une dispute avec les producteurs, quitta quant à lui la production et laissa l'animation image par image entre les mains de Dave ALLEN, Randall William COOK, Peter KLEINOW et Laine LISKA, Jim AUPPERLE étant chargé de réaliser les prises de vue miniatures.


Ce reptile géant du film CAVEMAN conçu par Jim DANFORTH semble désireux d'honorer Halloween qui s'annonce (haut); Dale KUIPERS a notamment construit pour Roy ARBOGAST la version grandeur nature chevauchée par l'acteur Ringo STARR (en bas ).

L'attaque d'un moustique géant, préfigurant ceux créés pour le film d'horreur SKEETER, vraisemblablement élaboré par Dale KUIPERS.

Cette première expérience à Hollywood lui valut les félicitations du grand maquilleur Rick BAKER qu'il admirait particulièrement et pour lequel il aurait déjà brièvement œuvré officieusement au temps de LA GUERRE DES ETOILES (STAR WARS: A NEW HOPE). 

Selon ses amis, Dale KUIPERS avait été chargé de sculpter les masques de deux extraterrestres de la séquence du bar de LA GUERRE DES ETOILES, ceux surnommés "Walrus man" (l'homme-morse) et "Hammerhead" (tête en marteau) de manière discrète, n'étant pas agréé par le syndicat des maquilleurs, à l'instar de l'apprenti de Rick BAKER, Rob BOTTIN - de surcroît mineur - auquel Dale KUIPERS devait par la suite être de nouveau associé, pour le meilleur comme pour le pire.

Comme Rick BAKER avait déjà constitué une équipe complète pour œuvrer sur LE LOUP-GAROU DE LONDRES (AMERICAN WEREWOLF IN LONDON), le maquilleur le recommanda à son disciple Rob BOTTIN, lequel recrutait des sculpteurs pour un autre film de loups-garous, HURLEMENT (THE HOWLING). Dale KUIPERS travailla étroitement avec Rob BOTTIN pour définir le loup-garou le plus spectaculaire. Alors que la production était bien avancée, il fut embarrassé d'apprendre que le film sur lequel travaillait Rick BAKER était aussi une histoire de loup-garou, qui se trouvait ainsi en compétition avec celui auquel il apportait sa collaboration - le mentor  prit à cet égard ombrage que Rob BOTTIN qu'il avait formé ait ainsi accepté de concevoir un loup-garou appelé à rivaliser avec le sien grâce aux techniques qu'il lui avait apprises. L'exposition aux produits chimiques dérivés du pétrole utilisés dans le studio contraignit par ailleurs Dale KUIPERS à retourner au Wisconsin pour recouvrer la santé, de même que ses difficultés avec l'Union syndicale des maquilleurs qui contesta son embauche alors qu'il n'y était pas affidé, en dépit du soutien de Rob BOTTIN.

Dale KUIPERS sculptant la main griffue d'un loup-garou pour HURLEMENTS (THE HOWLING) de Joe DANTE.

L'artiste au travail sur une tête présentant de plus petites oreilles que dans la version définitive.

Le réalisateur John CARPENTER, désireux de trouver un créateur susceptible de concevoir le monstre de THE THING, lui téléphona quelques mois plus tard, sur le conseil du responsable des effets mécaniques du film, Roy ARBOGAST, dont il avait été le collaborateur sur CAVEMAN; il bénéficiait aussi du soutien de Lawrence TURMAN et David FOSTER, producteurs sur les deux films. John CARPENTER lui exprima le souhait de voir concrétiser une créature qui se déplacerait de manière inédite, qui ne "vole, ni ne rampe, ni ne nage, ni ne marche". Lorsque l'artiste se rendit à Los Angeles pour lui montrer ses esquisses, John CARPENTER manifesta un grand enthousiasme, convoquant les membres de son équipe pour leur présenter en leur disant : "voilà, c'est exactement cela, il a trouvé ce qu'on cherchait.." L'artiste fut engagé et reprit le chemin de son studio à Green Bay dans le Wisconsin pour y travailler sur un prototype de la créature. Il conçut également des peintures relatives aux sept grandes scènes d'effets spéciaux prévues dans le scénario originel de Bill LANCASTER, depuis l'irruption du monstre dans le chenil au travers du simulacre de chien jusqu'à son apparition finale lorsque, devenu gigantesque en dilatant sa masse, il se mesure à un chasse-neige (voir dessin dans la première partie de l'hommage à THE THING), et il en imagina les spécificités et les origines.

La Chose abandonne son apparence canine dans la séquence du chenil vue par Dale KUIPERS.

Comme dans l'histoire originelle de John CAMPBELL dans laquelle l'entité métamorphe semble avoir une forme principale, très approximativement "humanoïde", Dale KUIPERS postula que la Chose avait une apparence précise, laquelle était révélée au travers de ses transformations mimétiques. Selon son idée, la créature aurait été une arme biologique envoyée pour ravager les mondes afin de permettre à une civilisation extraterrestre de les investir par la suite ( on peut alors supposer que ses créateurs auraient prévu une durée de vie limitée pour ne pas être à leur tour en proie à leur monstre ), que découvrait congelée dans la glace l'équipe d'un consortium à la recherche de pétrole à la fin du XXème siècle - à noter cependant que selon les dispositions internationales actuelles, l'exploitation industrielle de l'Antarctique est interdite. Dale KUIPERS imagina que la Chose pouvait émettre instantanément à partir de sa région supérieure de fins pseudopodes susceptibles de se solidifier et de se désagréger aussitôt, lui permettant d'adhérer et de se déplacer sur toute surface horizontale ou verticale - et peut-être même en l'air selon l'auteur. Les grands yeux jaune à facette fonctionnaient comme une pile solaire convertissant tout rayonnement en fluide visqueux générant les pseudopodes. 

La créature atteint sa taille maximale.

Pour accaparer l'apparence de ses victimes, la Chose commençait par se ficher sur la tête de sa proie en l'enserrant avec des pattes arthropodiennes extrêmement puissantes, puis enfonçait dans son cerveau l'équivalent de vrilles munies de milliers de petites structures fines comme des cheveux afin d'y puiser toutes les informations utiles pour pouvoir imiter son hôte. Une fois cette tâche accomplie, la Chose dissolvait totalement sa victime sous forme de gelée ingérée par le monstre, qui reconstituait ensuite très rapidement l'apparence de sa victime autour de son propre organisme. La créature, qui pouvait néanmoins être démasquée par  son poids excédant celui de son équivalent humain, était prompte à se défaire de son camouflage une fois découverte, pattes et vrilles s'extirpant de la bouche pour attaquer ses ennemis, tandis que la constitution d'apparence humaine se réduisait et fondait pour reconstituer le céphalothorax de la créature.

Un faciès monstrueux surgit du déguisement humain. Ce concept d'un extraterrestre insectoïde surgissant au travers d'un visage humain n'est pas sans évoquer certaines productions télévisuelles ultérieures, notamment LE MONSTRE ÉVADÉ DE L'ESPACE (SOMETHING IS OUT THERE) de Richard A. COLLA, dont ironiquement les effets spéciaux sont à porter au crédit du maquilleur Rick BAKER avec lequel Dale KUIPERS rêvait de travailler à l'issue de son expérience sur THE THING.

Bien que dépourvue d'intelligence propre, le cerveau de la Chose était par ailleurs capable de mémoriser un complet assortiment des caractéristiques les plus dissuasives des créatures rencontrées et de les combiner pour produire des hologrammes réalistes capables de terrifier ses adversaires.


La Chose de KUIPERS devant de deux de ses apparences hallucinatoires inspirées par des créatures rencontrées précédemment.

Le destin de Dale KUIPERS bascula au sens littéral lorsque, alors que son travail sur le prototype avait pris du retard, il fut soudain projeté dans la vitrine d'un magasin par un motard conduisant sous l'emprise de l'alcool. L'artiste étant suffisamment blessé pour être immobilisé durant deux mois, John CARPENTER décida au vu des transformations convaincantes de HURLEMENTS de faire appel à Rob BOTTIN, son complice de THE FOG, pour que celui-ci, commence à créer le monstre imaginé par Dale KUIPERS, jusqu'à ce que ce dernier soit à nouveau en mesure de travailler et intègre l'équipe. Rob BOTTIN parut réticent à reprendre le concept de quelqu'un d'autre, et de plus, n'adhérait pas totalement à la vision de son ancien assistant, tout en reconnaissant la qualité de son travail. Il estima que sa créature était "bien mieux que l'agrippe-visage (face hugger) d'ALIEN mais que, fondamentalement, il s'agissait toujours d'une sorte de gros cafard". Le réalisateur lui demanda alors qu'elle était sa propre représentation du monstre et Rob BOTTIN lui répondit qu'en raison même du terme de "Chose" par lequel on le qualifiait, il ne pouvait avoir de forme définie, mais devait changer perpétuellement d'apparence en passant d'une forme à une autre - et même être susceptible de présenter simultanément des traits empruntés à ses différentes incarnations précédentes. John CARPENTER se montra intrigué et, quand Rob BOTTIN lui présenta peu après un premier modèle bricolé autour d'une boule de Noël montrant un des aspects possibles de la Chose, il lui donna l'accord d'explorer cette nouvelle conception avec le dessinateur Mike PLOOG, qui avait la tâche de concevoir les storyboards du film et qui, comme le metteur en scène, fut conquis par les idées apportées par le jeune maquilleur.

Lorsque Dale KUIPERS fut rétabli, il déclina la proposition de son ancien maître d'œuvre de HURLEMENT de rejoindre l'équipe. L'artiste du Wisconsin était meurtri d'avoir vu le projet lui échapper et n'évoquait pas cet épisode sans une grande tristesse. Il estima aussi que la créature imaginée par Rob BOTTIN trahissait trop son inspiration grotesque issue des bandes dessinées, et qu'il était frustrant qu'elle ne possède pas d'apparence propre contrairement à celle qu'il avait élaborée; néanmoins, il ne semble pas qu'elle en avait davantage dans le scénario, aussi peu allusif soit-il, écrit par Bill LANCASTER, dans lequel elle pouvait même paraître réduite à une forme de virus transformant les corps selon les dialogues scientifiques de la première mouture, achevée un mois avant l'arrivée du remplaçant de Dale KUIPERS. Ainsi, la Chose de Rob BOTTIN qui paraît une forme de vie cellulaire d'allure primordiale, n'est pas si éloignée de celle qu'avait vraisemblablement en tête le scénariste, avec sa morphologie changeante. D'ailleurs, Dale KUIPERS laissa entendre que, si John CARPENTER avait donné son plein accord pour la construction de "sa" Chose, il avait perçu davantage de réserve de la part de la production; sans doute le coproducteur et principal initiateur du projet, Stuart COHEN, considérait-il que les idées personnelles de Dale KUIPERS s'écartaient significativement du scénario de Bill LANCASTER, lequel traduisait pour lui le traitement idéal pour adapter à l'écran la nouvelle WHO GOES THERE? de John CAMPBELL.

THE THING est demeuré un souvenir amer pour Dale KUIPERS.

Dale KUIPERS jugea que le film tel qu'il se fit n'était pas réussi, pointant des erreurs dans la continuité quant aux vêtements portés par les acteurs. Il considéra aussi, comme, il est vrai, beaucoup de critiques à l'époque de la sortie du film, qu'aussi brillants que fussent les effets spéciaux agencés par Rob BOTTIN et son équipe, ceux-ci ne représentaient qu'une démonstration n'ayant pas d'autre raison d'être que de prouver les capacités de leur créateur, sans être reliés à un véritable suspens. Il contesta ainsi à John CARPENTER la maîtrise de la mise en scène, qui n'aurait pas mis en valeur le cadre offert par la station antarctique pour planter son histoire, mais se serait contenté de filmer de longs corridors indistincts les uns des autres - la réalisation du film a cependant fini par faire l'unanimité en tant que  démonstration d'un huis-clos parfaitement angoissant par un metteur en scène au summum de son talent. On peut évidemment songer que la déception a sa part dans la faible considération de l'artiste pour un film duquel il a été écarté, et qu'il rejetait comme très en-deçà de ses deux films de science-fiction préférés, 2001 L'ODYSSÉE DE L'ESPACE (2001, A SPACE ODYSSEY) et ALIEN, dont il louait à contrario la direction. Si l'artiste évincé ne tint pas excessivement rigueur à Rob BOTTIN d'avoir substitué sa conception de la Chose à la sienne, estimant qu'il n'avait fait que saisir une opportunité pour sa carrière, même s'il rappelait que celui-là n'était "que l'élève de Rick BAKER et qu'il préférerait à l'avenir travailler avec le maître lui-même à présent" (bien que Rick BAKER fut tout autant l'élève de Dick SMITH auparavant), il demeura beaucoup plus amer au sujet de John CARPENTER, lequel avait apprécié sans réserve son travail et l'avait fait engager, avant que les circonstances le décident à donner son aval à un projet concurrent de celui avalisé.

En dépit de son expérience malencontreuse à Hollywood, il semble que Dale KUIPERS eut de nouveau contact avec le milieu du cinéma puisqu'il exécuta en 1985 une série de dessins conceptuels pour un autre grand projet de remake, LA MOUCHE (THE FLY). Ceux-ci détaillent une transformation réellement graduelle, empreinte d'un grotesque très organique qui permet de suivre précisément la manière par laquelle le corps de l'infortuné chercheur se mue en une créature dominée par les gènes de l'insecte. La production connut là aussi des aléas, et lorsque le réalisateur David CRONENBERG fut engagé, il confia les trucages à l'équipe de Chris WALAS avec lequel il avait collaboré sur une de ses œuvres précédentes, SCANNERS, et celle-ci développa sa propre conception du processus, avec les premiers stades se rapprochant plus notablement d'une maladie de peau conformément aux souhaits de CRONENBERG. L'artiste du Wisconsin aurait alors peut-être pu avoir l'occasion de travailler de nouveau en collaboration avec Rob BOTTIN, celui-ci ayant aussi réalisé un buste conceptuel pour le remake de LA MOUCHE, mais leurs candidatures ne furent pas retenues. 

La métamorphose très progressive agencée pour le remake de LA MOUCHE (THE FLY) - document présenté en exclusivité sur le site qui lui est consacré sur Facebook : 
https://www.facebook.com/pages/Dale-Kuipers/212712462116808?ref=stream&hc_location=stream


Dale KUIPERS avait par ailleurs réalisé des dessins de créatures extraterrestres d'inspiration reptilienne pour un projet d'adaptation d'une histoire de Ray BRADBURY portant sur une faille spatio-temporelle, mais le projet ne se fit pas, ce qui cette fois encore, dut contribuer à renforcer sa prévention contre le système hollywoodien.

Extraterrestre reptilien pourvu de trois yeux et de tentacules accessoires tiré du projet d'adaptation du récit de Ray BRADBURY.

La parution d'une bande dessinée de Dale KUIPERS, MANDELLA, avait été annoncée par une maison d'édition du Wisconsin, Green Bay comics, racontant la survie d'un naufragé sur une planète couverte d'une végétation à la croissance spectaculaire, lancé à la recherche d'une espèce intelligente qui pourrait l'aider à regagner son monde, mais cette entreprise-là non plus n'a visiblement pas vu le jour.

Souffrant de diabète, victime d'un cancer occasionnés par les produits chimiques avec lesquels il a été en contact dans son travail, Dale KUIPERS s'est éteint le 17 juillet 1996. Il a laissé une grande impression auprès de ceux qui l'ont connu, et, pour son anniversaire, le 26 octobre 2013, un musée à l'initiative d'Anthony ROCKEY ouvre ses portes à Mackinac, présentant notamment 36 pastels relatifs à la série INFANT EARTH, afin de conserver la mémoire d'une carrière artistique trop brève.

La pierre tombale de l'artiste, restituant sa passion pour les dinosaures.


La carte de visite du musée Dale KUIPERS.

vidéo d'entretien mise en ligne par le maquilleur et archiviste William FORSCHE : http://www.youtube.com/watch?v=g6nY1mCjUnA&hd=1


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Un auteur célèbre de science-fiction a disparu le 2 septembre 2013 à l'âge de 93 ans, Frederik POHL, écrivain américain né à New-York le 26 novembre 1919. En 1938, il avait rejoint en même temps qu'Isaac ASIMOV le groupe des Futurians, une association regroupant des passionnés de science-fiction de la côte est des Etats-Unis, souvent assez fortement orientés à gauche comme Damon KNIGHT ( lui-même ayant été un temps communiste ), et au sein de laquelle Frederic POHL rencontrera plusieurs de ses épouses successives, dont Judith MERRIL.

Ses activités dans la domaine de la publicité inspirent particulièrement à Frederik POHL une vision acerbe de la société de consommation, qu'il illustre notamment dans son roman PLANÈTES A GOGO. (THE SPACE MERCHANTS). Il a écrit de nombreux textes en collaboration, notamment avec Cyril M. KORNBLUTH (dont le roman précité) puis avec Jack WILLIAMSON, comme LES RÉCIFS DE L'ESPACE (THE REEFS OF SPACE), région au sein desquelles se réfugient ceux qui veulent échapper à une organisation estimée trop planificatrice et où la vie est possible grâce à de minuscules organismes symbiotiques, les Fusoriens, permettant de respirer en l'absence d'oxygène et assurant aussi la capacité de propulsion à des animaux tenant à la fois des poissons et des oiseaux ainsi qu'à d'autres aux allures de pieuvre, les pyropodes. Tandis que certains auteurs comme Arthur CLARKE et Stanislas LEM avaient imaginé dans des nouvelles que les astres puissent être un milieu abritant des formes de vie principalement constituées d'énergie, Frederik POHL n'hésitait pas à présenter dans plusieurs œuvres les étoiles elles-mêmes comme des formes de vie intelligentes non organiques, à tel point que dans une autre collaboration POHL-WILLIAMSON, L'ÉTOILE SAUVAGE (STARCHILD). un astre miniature synthétisé en laboratoire s'éveille à la conscience avant d'être attiré par un véritable corps céleste appelé à parfaire son éducation.

Dans les années 1970, Frederik POHL a obtenu la consécration pour une production individuelle, le cycle initié par LA GRANDE PORTE (GATEWAY) dans lequel les humains explorent des raccourcis de l'espace-temps créés par une ancienne civilisation d'extraterrestres humanoïdes, les Heeches, entreprise dans laquelle ils sont assistés par des Australopithèques - dans leur roman HEAVEN, Jack COHEN et Ian STUART faisaient de manière analogue collaborer les astronautes avec d'autres parents éteints de notre lignée évolutive, des Néandertaliens.


DIALOGUE AVEC L'EXTRATERRESTRE (THE VOICES OF THE HEAVEN ) : les difficultés que présente la compréhension d'une espèce extraterrestre insectoïde.


Des créatures extraterrestres tentaculaires imaginées par Frederik POHL pour le roman THE AGE OF THE PUSSYFOOT (en français, L'ERE DU SATISFACTEUR) et en dessous illustration de Wallace WOOD pour la nouvelle I PLINGOT YOU WHO publiée par le numéro de février 1959 de la revue Galaxy.

Frederik POHL a aussi été éditeur de deux des plus célèbres magazines littéraires de science-fiction des années 1960, GALAXY et IF.

Son œuvre n'a fait l'objet que d'une seule transcription au cinéma, un film futuriste méconnu dirigé par le réalisateur italien Luigi COZZI (ALIEN CONTAMINATION), LE TUNNEL SOUS LE MONDE ( THE TUNNEL UNDER THE WORLD ).

Il a par ailleurs consacré un livre à l'auteur TIBERE, ce qui lui a valu d'être alors l'autorité de référence de l'"Encyclopedia universalis" sur le sujet.




Après celles de Nigel KNEALE le 29 octobre 2006 puis de Jimmy SANGSTER le 19 août 2011, un dernier scénariste emblématique de la société de production Hammer a disparu 30 septembre 2013. Fils de Tony HINDS, un des fondateurs de la Hammer avec James CARRERAS, Anthony HINDS avait initié la série d'adaptations sur le grand écrans des aventures du Professeur Quatermass écrites pour la BBC par Nigel KNEALE, dont la première est sortie en 1955 sous le titre QUATERMASS XPERIMENT (LE MONSTRE en France, THE CREEPING UNKNOWN aux Etats-Unis); il eut ainsi un rôle décisif dans le tournant qui vit la compagnie s'orienter résolument vers le fantastique. 


L'étrange créature féline du poster de l'adaptation cinématographique de la première aventure du Professeur Quatermass, une mutation engendrée dans le zoo de Londres par l'entité extraterrestre, en fait sans rapport direct avec une scène du film ( la créature s'introduit bien dans l'enceinte du parc, mais dissout complètement ses victimes, à la différence de l'astronaute dont elle a fait son hôte ).

En 1968, il mit en œuvre une autre production singulière de la Hammer, LE PEUPLE DES ABÎMES (THE LOST CONTINENT) dans lequel, à la manière de nouvelles de William Hope HODGSON comme LA CHOSE DANS LES ALGUES, des naufragés se trouvent échoués sur les bancs d'algues de la mer des Sargasses, en butte à de voraces créatures marines, et rencontrant ici de surcroît les descendants d'une expédition espagnole - dont un inquisiteur interprété par l'acteur Darryl READ, également un musicien promoteur de la musique punk, est décédé dans un accident de moto en Thaïlande le 23 juin 2013 alors qu'il avait entrepris de participer à un documentaire allemand retraçant sa carrière.




LE PEUPLE DES ABIMES : une créature marine à mi-chemin du scorpion et de la sauterelle devant les ballons qui permettent aux naufragés de se déplacer sur le tapis incertain constitué par les algues des Sargasses (haut) et les descendants de conquistadors dont l'un présente le visage poupin de Darryl READ.


Sous le pseudonyme de John ELDER, Anthony HINDS écrivit lui-même, lorsque le scénariste attitré Jimmy SANGSTER se lassa de l'épouvante gothique, nombre de scénario de productions fantastiques comme LA FEMME-REPTILE (THE REPTILE), relatif à une malédiction changeant régulièrement une femme en créature sanguinaire. 


La femme-reptile tient la promesse du titre grâce à un maquillage de Roy ASHTON.


La disparition du producteur, et troisième scénariste représentatif de la production de la Hammer, contribue à tourner symboliquement la page de ce morceau d'histoire du cinéma fantastique anglais, alors que les studios Bray dans lesquels les films étaient réalisés ont, au grand désespoir des personnalités du cinéma qui avaient tenté de s'y opposer, été vendus pour être convertis en ensemble résidentiel de luxe durant l'été.



Mentionnons par ailleurs le décès le 8 août 2013 de l'actrice Karen BLACK, emportée par un cancer; ayant tourné pour Alfred HITCHCOCK et dans TRILOGY OF TERROR, un téléfilm écrit par Richard MATHESON (voir paragraphe dans l'article précédent) et William NOLAN ( auteur de L'AGE DE CRISTAL évoqué dans l'article sur THE THING), elle avait été en 1986 le second rôle du remake de INVADERS FROM MARS réalisé par Tobe HOPPER, aux côtés d'extraterrestres pittoresques créés par l'équipe de Stan WINSTON.



Enfin, signalons la disparition le 6 octobre 2013 de Diana HARRYHAUSEN suivant de peu celle de son époux, à qui on a consacré un hommage dans l'article précédent. Durant les 50 années de mariage, elle accompagnait son mari sur les tournages et le suivait aussi parfois dans ses rencontres avec ses admirateurs, se faisant remarquer par sa grande gentillesse. Saluons donc ici la mémoire de celle qui a soutenu ce magicien du cinéma durant une bonne partie de sa carrière, lui permettant de se concentrer sur son art qui nous émerveille encore aujourd'hui.

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LE YETI SE FAIT TOUJOURS ATTENDRE

Après certaines études de "scalps" attribués à "l'Abominable Homme des neiges" qui avaient conclu que les poils provenaient de yacks, d'autres prélèvements ont à l'issue de nouveaux tests génétiques été cette fois attribués à un animal de la famille des ours. Décidément, le supposé primate inconnu reste bien insaisissable. Une seule certitude, l'hypothétique créature n'est pas anthropophage à en juger par le nombre de dépouilles d'alpinistes accidentés qui reposent inviolées dans le massif himalayen..


NOTA: les évolutions indésirables d'internet liées aux incompatibilités techniques entre les différents systèmes (plugs-in qui plantent, shockwave flash inopérant, etc.. sans parler des fenêtres publicitaires intempestives lors de la rédaction des messages et des problèmes d'espacement entre paragraphes) conduisent dans l'attente de mises à jour satisfaisantes par les gestionnaires des moteurs de recherche pour Windows 7 à espacer les publications.