samedi 5 juillet 2008

L'ÉTRANGE FIN DES MARSUPIAUX ?

Les Marsupiaux comme le Kangourou représentent une lignée de Mammifères chez lesquels les petits naissent à un stade fœtal et achèvent leur développement dans la poche maternelle, ou marsupium, laquelle donne son nom au groupe; seuls les Monotrèmes pondeurs d'œufs comme l'Ornithorynque présentent des caractéristiques plus ancestrales chez des Mammifères vivants. Apparus à la fin de l'ère des Dinosaures en même temps que les ancêtres des Mammifères plus modernes ou Placentaires, les Marsupiaux se sont répandus dans le monde entier avant d'être évincés par ces derniers, sauf dans les régions plus isolées.
Ils ont ainsi pu se maintenir au sommet de la chaîne alimentaire en Amérique du sud jusqu'à l'invasion des Tigres à dents de sabre. Aujourd'hui encore, le Nouveau-monde abrite quelques espèces de petits Marsupiaux comme l' Opossum. On trouve également en Indonésie plusieurs espèces comme le Couscous à la robe tachetée. Néanmoins, c'est en Océanie, en dépit de la présence, à l'origine, d'un petit Mammifère plus moderne, Tingamarra, vite supplanté, que les Marsupiaux ont pu pleinement prospérer.
Lorsque les premiers humains ont investi l'Australie il y' a quelques dizaines de milliers d'années, les Marsupiaux y régnaient sans partage malgré la présence de quelques Reptiles prédateurs. L'un de ces Marsupiaux était vraisemblablement un carnivore redoutable, tandis qu' une espèce végétarienne devait peser jusqu'à 3 tonnes. Ces différentes créatures ont disparu après l'installation des populations "arborigènes".

Beaucoup plus récemment, les Européens transformèrent à leur tour l'environnement australien, et, après le Dingo, Chien d'Asie importé par les "Arborigènes", ceux-ci amenèrent avec eux de nouveaux animaux de compagnie, ce qui eut pour effet d'occasionner une seconde vague d'extinction, cette fois de petits Marsupiaux. Le dernier grand Marsupial carnivore, le Thylacine ou Loup marsupial, concurrencé par le Dingo, qui ne substituait plus qu'en Tasmanie à l'arrivée des Européens, fut quant à lui totalement exterminé au milieu des années 1930 par les éleveurs parce qu'il s'attaquait aux Moutons.


Or, alors que nombre d' Australiens prennent conscience de leur devoir de préserver les espèces encore vivantes de cette faune unique, une mystérieuse maladie décime le plus grand Marsupial restant, de la taille d'un Chien, le Diable de Tasmanie ( parfois appelé aussi Sarcophile ), lequel ne subsiste plus que sur l'île de Tasmanie. Les représentants de cette espèce, qui est l'équivalent écologique du Glouton en Océanie, sont en effet rongés par de volumineuses tumeurs faciales cancéreuses qui leur sont fatales, et qui les font ressembler à l' Ourse mutante victime du mercure dans le film PROPHECY, inspiré indirectement de la catastrophe écologique de Minamata . Il semblerait que l'origine du mal soit
à rechercher parmi des cellules malignes, qui se propageraient, à l'occasion de morsures, d'un individu à l'autre, la population s'étant suffisamment homogénéisée sur un espace réduit pour que la variabilité immunitaire se soit estompée. Même s'il arrive, comme l'illustre tristement le drame de l' encéphalopathie spongiforme bovine, que des composants déviants d'un organisme puissent non seulement infecter d'autres individus mais aussi franchir la barrière génétique entre espèces, le danger pesant sur le Diable de Tasmanie illustre la difficulté d'assurer la pérennité d'une espèce lorsque celle-ci ne subsiste plus qu'au travers d'un nombre assez restreint d'individus dans quelques réserves, ce qui empêche que se développent des profils génétiques relativement variés, susceptibles de développer des spécificités individuelles profitables à l'espèce. Ces considérations prennent un tour particulièrement sinistre quand on songe que bien des espèces dans le monde sont réduites à un très petit nombre d'individus : il ne resterait plus que 1500 Pandas géants, ainsi que seulement quelques centaines de Gavials ( Crocodilien indien piscivore à museau très effilé ) et de Dauphins d'eau douce à long bec ( en Inde et en Amazonie ) après l'extinction du genre chinois Lipotes en 2006 suite à l'édification d'un barrage ).
En l'absence de remède, l'espèce, popularisée par un personnage des dessins animés de la Warner Bros, ne devrait plus en dernier recours sa survie qu'aux individus vivant en captivité, et il ne resterait alors qu'à souhaiter que les zoos gèrent leur population avec une plus grande efficience que cela s'est produit pour le Loup marsupial : en 75 ans, le zoo de Londres avait ainsi hébergé 18 individus, puis l'animal s'est éteint simultanément dans la nature et en captivité.

Et voici que les Koalas, déjà fragilisés par leur régime alimentaire spécialisé les rendant dépendants des Eucalyptus, dont les forêts cèdent du terrain devant l'extension des activités humaines et qui pâtissent de l'aridité due notamment au réchauffement climatique, sont eux aussi menacés, étant les victimes d'un mystérieux Virus causant le cancer. Ce Virus semble apparemment être entré dans une phase active qui vient au plus mauvais moment fragiliser encore davantage une espèce mise en péril par la réduction des espaces naturels.

Cette concordance troublante paraît sonner comme le glas de la faune résiduelle de Marsupiaux, alors que, pour cette fois, l'implication directe de l'action humaine n'est pas avérée. On dirait que, après avoir dû céder leur place devant les Mammifères placentaires, sauf en Océanie, les derniers Marsupiaux y étaient finalement rattrapés par la marche incoercible de l'évolution, à la manière de Faust que le diable vient chercher lorsque son sursis est épuisé et que l'heure des comptes a sonné. Ces événements, même si on ne peut exclure qu'il s'agisse de simples coïncidences, ne peuvent que surprendre ceux, au rang desquels je me place, qui ne sont pas réellement de grands adeptes de la théorie de la pandémie ( bien qu'ayant en ce qui me concerne écrit il y' a longtemps une courte nouvelle sur ce thème ), laquelle est censée selon quelque chercheurs avoir décimé la plupart des grands Mammifères à la fin de la dernière ère glaciaire . Lorsque la nature vient seconder l'action destructrice de l'homme, on ne peut qu'être extrêmement inquiet quant aux chances de maintien de la richesse de la vie sur notre planète.

lundi 23 juin 2008

GALERIE DE CREATURES DE STAN WINSTON


Quelques instantanés de la carrière du maquilleur et créateur d'effets spéciaux pour faire suite à l'hommage consécutif à sa disparition toute récente (voir hommage du 17 juin 2008 intitulé "Un magicien du cinéma s'en est allé" ).

Le premier monstre de Stan WINSTON est sans doute la créature vorace de PARASITE de Charles BAND, film qui a vu pratiquement vu débuter l'actrice Demi MOORE, dans lequel Robert GLAUDINI incarne un scientifique qui s'est enfui après s'être injecté le parasite qu'il a créé, pour le soustraire aux visées d'un état totalitaire. Stan n'était pas très fier de sa participation à ce petit film d'épouvante estimable, bénéficiant d'une atmosphère assez glauque, mais on a vu depuis des créatures nettement moins réussies que celle-ci, qui n'est d'ailleurs pas sans anoncer un des stades du monstre de LEVIATHAN ( à noter que le Parasite est aussi mystérieux que la Joconde, puisqu'il possède un nombre d'yeux assez indéfini, qui paraît varier en fonction de l'éclairage de chaque plan - son sourire ( carnassier ) est par contre sans ambiguïté ).

Parmi les diverses incarnations de la Chose (THE THING de John CARPENTER ) figure ce chien glabre assez informe, que Stan a conçu pour suppléer, à sa demande, Rob BOTTIN victime de surmenage. La main qui l'anime lui confère des mouvements très organiques, et la créature incarne parfaitement le caractère particulier du monstre qui, à cet instant, ressemble à un chien sans en être un, pour reprendre les termes du scénario.

MANIMAL était une série policière dont le héros joué par Simon MacCORKINDALE ( également vu, entre autres, dans LES DENTS DE LA MER 3 ) était capable, par sa concentration mentale ( il est fort... l'animal ! ) de se changer en différentes bêtes pour espionner des malfrats ( dont l'un interprété par le sinistre Richard LYNCH ). Stan WINSTON réalisa de belles transformations en Panthère et Faucon, qui, bien que principalement limitées à la tête pour des raisons financières, étaient fort efficaces ( des années plus tard, il conçoit aussi les saisissants hybrides hommes-bêtes de L’ÎLE DU DR. MOREAU de John FRANKENHEIMER ) - la métamorphose en serpent est quant à elle dûe à Michael McCRAKEN à qui sera consacré un futur article.

On ne présente plus TERMINATOR de James CAMERON. Stan WINSTON s'est chargé notamment du maquillage de l'androïde perdant son apparence humaine, et a œuvré sur les suites, concevant des squelettes métalliques impressionnants pour les scènes se situant dans le futur.
Pour L'INVASION VIENT DE MARS de Tobe Hopper, il conçut, à partir des concepts initiaux de l'illustrateur William STOUT, l'inquiétante Intelligence suprême et ses serviteurs ( volontairement ) grotesques mais nonobstant redoutables, animés de manière ingénieuse comme indiqué dans le premier volet de l'hommage.

L'extraterrestre chasseur d'hommes de PREDATOR, avec sa tête insectoïde, est une autre création célèbre de Stan WINSTON. Son faciès n'apparaît que peu de temps dans le premier film mais il s'agit là encore d'un moment marquant, et il est encore bien plus terrifiant dans le film que sur les photos.
Stan WINSTON a mis en scène une de ses créations dans PUMPINKHEAD, histoire d'un démon vengeur.
S'il n'a pas œuvré sur ALIEN, il a travailé sur sa suite, ALIENS, riche en créatures terrifiantes.

Son studio a également donné vie aux mutations de l'entité transgénique de LEVIATHAN, tâche conséquente bien que le monstre ne soit souvent qu'assez fugitivement entrevu dans le montage final.
La physionomie du monstre de RELIC, qui évoque un mélange de Vertébré et d'Arachnide, présente quelque parenté avec celle de PREDATOR.

Pour la comédie GALAXY QUEST, Stan WINSTON a réalisé des êtres un peu moins terrifians, comme cette espèce bipède qu'on devine aisément goulue en observant sa gueule béante, d'après des concepts du peintre Wayne BARLOWE.

Pour rendre hommage aux petits films de série B, et échapper aux images de synthèse que les grands studios réclamaient de plus en plus, Stan WINSTON avait notamment conçu DAY OF THE WORLD ENDED, avec Natassia KINSKI et Randy QUAID. Sans doute soucieux que l'aspect psychologique de l'histoire soit au premier plan, Stan a finalement fort peu dévoilé son extraterrestre qui, avec sa coiffe tentaculaire évoque - à ceci près qu' il a un oeil unique au lieu de trois - la créature de LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE de Christian Niby, fidèlement inspirée de la description de la nouvelle de John CAMPBELL, qu'on aurait dû voir à l'écran, si les producteurs de la RKO, la jugeant trop effrayante, n'avait pas décidé de détruire le costume réalisé au profit de James ARNESS grimé ( le sort de celle qui aurait dû être le premier extraterrestre non humanoïde fut ainsi scellé et celle-ci disparut à jamais).

Même si Stan WINSTON est encore l'auteur de d'autres maquillages célèbres, notamment ceux d'EDWARD AUX MAINS D'ARGENT et d'ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE, difficile de ne pas évoquer ses Dinosaures, gigantesques machineries très loin du grimage plus traditionnel d' acteurs qu'il réalisait à ses débuts à la télévision. Il avait eu quelques devanciers en la matière, l'Anglais Roger DICKEN ou l'Italien Carlo RAMBALDI, mais il avait affiné la technique en obtenant des mouvements souples, même si la sophistication n'empêchait jamais quelques difficultés lors du tournage alors que celles-ci ne s'étaient pas forcèment manifestées lors des répétitions. Les animations informatiques de la trilogie JURASSIC PARK ont dans les médias estompé les Dinosaures que son équipe avait agencés, tels que le Tricératops malade, les Vélociraptors et le Tyrannosaure ( dans nombre de plans ) du premier film, le petit Tyrannosaure geignard de la suite LE MONDE PERDU et l'énorme Spinosaurus de JURASSIC PARK 3.
Ainsi, même si son nom n'était peut-être pas très familier du grand public, Stan WINSTON est une référence dans la profession, et celui qui était à l'origine de nombre des êtres saisissants aperçus dans les salles obscures.

vendredi 20 juin 2008

UN SITE DÉDIÉ AUX CRÉATURES ACTUELLES ET DISPARUES, RÉELLES ET IMAGINAIRES

Sans les êtres vivants ( terme consacré mais qui, jusqu'à l'apparition d'une vraie génération de robots intelligents, apparaît pléonastique ), le monde ne serait qu'un désert minéral. La végétation habille le décor et les animaux l'animent. Pourtant, tout particulièrement à notre époque, les êtres humains se désintéressent pour la plupart des autres espèces avec lesquelles ils partagent leur planète, et si une totale inculture en histoire, en littérature générale ou en art passe encore souvent pour quelque peu infamante dans la plupart des milieux, il n'en va pas de même pour le domaine du vivant. Alors que laisser entendre que Napoléon BONAPARTE ou Winston CHURCHILL seraient antérieurs à Jules CESAR entraînerait un ridicule immédiat pour celui qui commettrait une telle anachronie, ne pas savoir si l'Araignée est un Insecte ou même si l'Ecrevisse est un Mollusque, comme il était affirmé dans une ancienne émission animalière par un animateur pourtant par ailleurs passionné et tout à fait estimable, ne suscite pas la moindre critique. Combien d'hommes de la rue pourraient simplement citer les dix plus importants groupes animaux actuels correspondant aux principaux types d'organisation ( sur au moins une trentaine existant ), alors qu'ils sont tous représentés par des espèces connues du grand public ? La connaissance des grandes lignes du vivant est de moins en moins requise dans la culture de "l'honnête homme", et même les animaux les plus connus sont ainsi pour l'opinion publique laissés dans l'indéterminé, dans un flou général dont les seules catégories acceptées sont en général "comestibles" et "nuisibles" - ce qui est d'usage pratique, mais un peu limité, on en conviendra, et ne représente pas une appréhension plus fine que celle qui devait prévaloir chez nos ancêtres cro-magnons.

Il faut dire que certaines des meilleures émissions consacrées à la diversité animale, comme LES INVENTIONS DE LA VIE ( faisant suite aux deux extraordinaires séries de L'AVENTURE DES PLANTES ) de Jean-Pierre CUNY et Jean-Marie PELT, datant de bien avant l'avènement de la télé réalité – celle qui est censée montrer de "vrais gens", alors que tout y est scénarisé, paraît-il ! non seulement ne sont plus diffusées depuis une quinzaine d'années mais ne sont même plus disponibles du tout à l'heure où cette présentation est écrite. Par ailleurs, les musées d'histoire naturelle restreignent actuellement toujours plus l'accès du public aux collections jadis présentées plus largement, pour cause d'une muséographie moderne qui, au nom du pédagogique et du ludique ( non critiquables lorsqu'ils ont leur place sans se substituer complètement au reste ), le prive de pouvoir de lui-même découvrir la variété des espèces - mais il est vrai que nous sommes dans l'ère de l'instantanéité, aussi l'époque commande-t-elle sans doute d'aller à l'essentiel, au lieu d'inciter le visiteur à acquérir les connaissances de manière active, ce qui est pourtant la clé de la parfaite assimilation, de la bonne compréhension et de la mémoire à long terme. Par ailleurs, tandis que les crédits affectés à la recherche fondamentale sont toujours davantage réduits, les milieux scientifiques pratiquent de plus en plus la cooptation, et nombre de publications mises sur internet sont-elles même à présent interdites d'accès au vulgus pecum qui ne dispose pas des précieux sésames, comme si ceux qui ont le privilège d'exercer dans un domaine représentant un intérêt particulier n'étaient guère enclin à faire partager ce qu'on s'imagine pourtant être leur passion - nonobstant, d'aucuns ( voire les mêmes) déplorent pourtant le peu d'intérêt et de culture du grand public pour le domaine scientifique.

La connaissance de l'histoire de la vie devrait cependant conduire à la relativisation et à l'humilité, lorsqu'on réalise le nombre de faunes différentes qui se sont succédées avant l'avènement de l'homme moderne, dernier venu sur la grande scène de la vie, et cette méconnaissance assez générale ( excepté dans une moindre mesure pour les Dinosaures si populaires auprès de la jeunesse ) témoigne d'un anthropocentrisme avéré. Plus grave, cette indifférence quasi-complète se traduit par la disparition non naturelle d'un nombre toujours plus grand d'espèces victimes du "progrès" et d'un matérialisme omniprésent. On peut penser qu'une meilleure connaissance de la diversité animale permettrait un plus grand respect et un désir de protection à l'égard des animaux les plus méconnus, dont certains existaient déjà sur notre planète il y'a plus de 500 millions d'années - grand âge qui devrait susciter plus d'égard !..

Une simple Anémone de mer peut fasciner par sa beauté, comme ce spécimen qui évoque un œil.

Ce manque de curiosité pour le monde vivant, plus étonnamment, se rencontre même souvent chez les auteurs de science-fiction qui imaginent des formes de vie extraterrestres, lesquelles ne peuvent pourtant en théorie que s'appuyer sur le seul exemple que nous connaissions, la vie qui s'est développée sur notre planète. Il faut dire que ceux-ci, en dépit de leurs multiples talents, viennent presque tous de la physique ( John CAMPBELL, Isaac ASIMOV, Arthur CLARKE, Gregory BENFORD, etc... ), ce qui est un atout évident pour décrire les réalités physiques de l'univers mais amène quelquefois des approximations dans le domaine des sciences naturelles. Il me paraît même un peu surprenant qu'on se passionne pour les créatures imaginaires sans éprouver réellement d'intérêt pour les êtres si divers qui existent réellement, de même peut-être qu'à l'inverse, on puisse se passionner pour le monde vivant sans jamais se demander si la vie s'est développée sur d'autres mondes et à quoi, en ce cas, elle pourrait ressembler. Dans les romans de science-fiction, les extraterrestres ne sont souvent qu'à peine évoqués, de manière impressionniste, l'auteur ne prenant pas la peine de les décrire, comme s' il ne s'agissait que d'un atour puéril du genre, sur lequel il ne convenait pas de s'attarder. Il n'est jusqu'aux films de monstres dont les réalisateurs coupaient parfois presque tous les plans dans lesquels figuraient la créature, comme si porter un peu d'attention à une forme de vie étrangère était ressenti comme une médiocre diversion, le recours là encore à un pauvre artifice détournant de la pureté de la mise en scène - il est vrai que c'était avant le déferlement des images de synthèse, qui montrent à présent complaisamment des créations édulcorées dont le rapport à la réalité concrète a été perdu, et qui ne sont plus que des chimères ectoplasmiques et infographiques, ce qui en fait, selon moi, disparaître tout l'attrait ou peu s'en faut.

A l'inverse, certains sites assument par contre parfaitement leur prédilection pour la pornographie ou pour le mauvais goût, ou bien pour d 'autres intérêts divers, que chacun estimera plus ou moins acceptables selon les sensibilités de chacun. Le présent blog affirme quant à lui clairement son intérêt aussi bien pour la diversité de la vie que pour les genres de l'imaginaire qui ont plus ou moins directement rapport avec les créatures issues de l'imagination et dont les êtres réels constituent malgré tout peu ou prou le modèle. Ce site, en dépit de la portée du champ envisagé, n'a à priori qu'une ambition modeste tant il est vrai que les sujets les plus divers sont déjà abordés, souvent tout à fait valablement, sur internet alors que son développement devient de plus en plus incontournable, mais il ne vise qu'à enrichir l'offre, espérant pouvoir peut-être susciter un peu de curiosité de la part de ceux qui ne sont pas insensibles aux thèmes concernés; seule la suite dira si cette initiative était fondée. Des suggestions pertinentes éventuelles sont également susceptibles de faire évoluer le site, en fonction naturellement de l'optique ici retenue. L'auteur ne s'interdit pas d'aborder si nécessaire les sujets avec une certaine liberté de ton, réticent à céder à tous les conformismes dominants, mais jamais sans rigueur - tout en s'efforçant, au nom peut-être d'un "élitisme de bon aloi" de rester accessible au plus grand nombre, se tenant autant à l'écart de la trivialisation actuelle de la langue que, à l'inverse, de l'utilisation de jargons trop abscons compris seulement d'un petit nombre. Les partis pris inévitables ne sont d'ailleurs que la conséquence de l'émerveillement pour le monde vivant sous toutes ses formes et de l'admiration pour les vrais passionnés et les créateurs dont les réalisations sont à la hauteur de leurs rêves. Le philosophe ERASME écrivait qu'à un humaniste, rien de ce qui concernait l'homme n'était étranger ; ici, affirmons qu'aucune créature, qui est, a été ou sera vivante, dans le monde réel comme dans les projections imaginaires, ne nous laisse indifférents...

De tous temps, les hommes ont inventé des créatures imaginaires, comme la Gorgone, ici dans une version "modernisée" ( illustration originale ).


NOTE: à ceux qui estimeraient éventuellement que ce site pratique le mélange des genres, il convient de préciser que, même si son objet n'est pas identique, il souhaite renouer avec l'esprit, entre autres, de l'éclectisme de l'ancienne émission TEMPS X, regrettée et jamais remplacée.

PS: le sous-titre est un hommage à l'astronome et écrivain français Camille FLAMMARION, et à son ouvrage LES MONDES IMAGINAIRES ET LES MONDES REELS.

( les sources iconographiques externes sont utilisées à titre d'exemple et d'illustration dans un but non lucratif selon les dispositions consacrées, généralement avec leur référence; les omissions seront rétablies immédiatement sur simple demande des auteurs. De la même façon, les textes et illustrations originales de ce blog peuvent être reprises à titre de citation, mais ne doivent pas être exploités à des fins commerciales sans l'aval de l'auteur. )

mardi 17 juin 2008

UN MAGICIEN DU CINEMA S'EN EST ALLE


Je viens d'apprendre non sans une certaine émotion le décès avant-hier, dimanche 15 juin 2008, de Stan WINSTON, un des plus grands noms des effets spéciaux, dont on a appris qu'il se battait depuis sept ans contre un cancer de la moelle des os.

Tranquille père de famille, Stan WINSTON était aussi un des artistes les plus talentueux et innovants. Ayant appris le maquillage dans les studios DISNEY, il établit rapidement son atelier, qui ne cessa de croître, devenant une véritable entreprise. Après avoir débuté à la télévision, sachant tirer le meilleur parti d'un budget modique ( les transformations de la série MANIMAL ), il s'imposa au cinéma en même temps que les Rob BOTTIN ( TOTAL RECAL ) et Rick BAKER ( LE LOUP-GAROU DE LONDRES, GORILLES DANS LA BRUME ), génération dont le vétéran du maquillage Dick SMITH ne manquait pas de souligner l' inventivité. Généreux, Stan WINSTON insista pour que son nom n'apparaisse que marginalement dans le chef-d'oeuvre du cinéma d'épouvante et de science-fiction THE THING, afin de ne pas éclipser celui de Rob BOTTIN qui était crédité du projet et qui, victime du surmenage, ne pouvait plus faire face à la charge considérable de travail malgré ses nombreux assistants.

Stan WINSTON n'hésitait pas, un peu à la manière du marionnettiste Jim HENSON, créateur du MUPPETT SHOW disparu très précocement ( qui, dans THE DARK CRYSTAL, avait notamment créé les Echassiers du vent à partir d'acrobates juchés à quatre pattes sur des échasses ), à employer les moyens les plus artisanaux pour dissimuler la morphologie humaine, avec une réussite stupéfiante : le chien glabre de THE THING n'était qu'une marionnette à main, les extraterrestres patauds de L'INVASION VIENT DE MARS étaient interprétés par des géants portant sur eux un nain harnaché dans le sens inverse, et la Reine d'ALIENS était jouée par un animateur suspendu dont les mains tenaient des membres griffus au bout de baguettes. Pourtant, à l'époque de la surenchère techno-idéologique, ces animations que les modernistes à tout crin jugeraient aujourd'hui sommaires n'ont rien perdu de leur pouvoir à terrifier les spectateurs, et leur réalisme tenait justement à ce qu'un être humain les animait.

Comme le Britannique Christopher TUCKER, concepteur des maquillages de LA GUERRE DU FEU et de THE ELEPHANT MAN, qui s'était rêvé initialement chanteur d'opéra, Stan WINSTON n'avait au départ considéré le maquillage que comme une première étape, souhaitant devenir acteur, ce qui n'arriva pas. Mais son goût de mettre en scène des personnages le poussa à passer à la réalisation avec un petit budget ( PUMPINKHEAD ).

Alors que d'autres maquilleurs comme Rob BOTTIN et Chris WALAS ( LA MOUCHE ) se résignèrent à opter pour des maquillages plus conventionnels ( des cicatrices dans MISSION IMPOSSIBLE pour le premier, par exemple ) en réaction à la concurrence défavorable engendrée par la situation hégémonique des images générées par ordinateur malgrè le caractère irréel de celles-là, Stan WINSTON tenta pendant des années de contrer le recours à la facilité de la création numérique en poursuivant dans la voie des maquillages spéciaux et des effets mécaniques, ce qui ne l'empêchait pas de tirer le meilleur parti des innovations technologiques avec ses animatroniques: les médias dominants ont fait accroire au nom de la pensée unique et réductrice que les dinosaures de JURASSIC PARK étaient réalisés en images de synthèse, alors que ceux qui terrifient ou fascinent le plus les spectateurs, ignorants de la vérité, sont en fait les animaux grandeurs nature conçus par Stan WINSTON, avec leur machinerie sophistiquée ( l'incroyable tricératops malade avec sa respiration difficile n'a rien à envier quant au réalisme aux reptiles des véritables documentaires animaliers, de même que le bébé tyrannosaure de la suite, animé depuis le dessous de la table ). Stan WINSTON avait récemment produit une série de petits films sans prétention, afin que des oeuvres sans effets spéciaux contrefaits par les ordinateurs puissent encore exister, rendant ainsi hommage aux vrais amateurs de cinéma rétifs aux productions qui ne sont plus que des pastiches de jeux vidéos.

Par ailleurs, ce qui aurait sans doute déplu au philosophe Alain FINKIELKRAUT dans son désir, non illégitime il est vrai, d'établir des hiérarchies culturelles, Stan WINSTON, comme le compositeur Jerry GOLDSMITH, refusait de verser dans un certain snobisme en établissant une opposition entre les oeuvres "nobles" et les productions commerciales, estimant que tout projet pouvait porter en lui son intérêt si la qualité était au rendez-vous ( on sait que depuis toujours, au sein par exemple de la littérature de science-fiction, notamment française, des oeuvres sont discréditées non pas tant en raison d'un manque d'invention ou de talent que parce qu'elles ne paraissent que dans des collection réputées "de gare", et après tout, les œuvres du Quattrocento et des peintres flamands étaient souvent à l'origine de simples œuvres de commande et autres portraits complaisants pour servir au prestige du commanditaire ). Le cinéma, art contemporain, a produit les équivalents modernes des Michel-Ange et autres RODIN, dont un perfectionniste comme Stan WINSTON était un digne héritier, en dépit du mépris habituel témoigné par les élites auto-proclamées pour les oeuvres d'imagination.

Contrairement à Jerry GOLDSMITH, totalement et lamentablement ignoré, notamment en France, lors de sa disparition, dont la réputation est cependant promise à un bel avenir ( on voit ainsi se multiplier les hommages sur You tube et un site français s'est créé pour honorer sa mémoire ), Stan WINSTON avait eu la chance de connaître une vraie consécration par les professionnels, avec l'obtention de plusieurs Oscars et son inscription sur le "Hall of fame" d'Hollywood Boulevard.

Stan WINSTON faisait rêver nombre de ceux qui aimeraient exercer un métier créatif, mais le degré d'achèvement de ses créations et de ses compétences techniques pouvait finalement impressionner ceux qui auraient aspiré à suivre son exemple. Même si le caractère artisanal avait fini par disparaître, en raison du succès des studios Winston devenus une véritable entreprise, il a permis à une nouvelle génération de se former et de viser l'excellence, comme Alec GILLIS et Tom WOODRUFF ( ALIEN 4, TREMORS ).

Après le compositeur Jerry GOLDSMITH qui avait donné une âme à tellement de films, un autre géant du cinéma contemporain quitte la scène vaincu par le cancer. C'est définitivement un certain genre de cinéma qui achève de disparaître.

Comme les années 1980 paraissent loin à présent que sont partis deux des plus grands noms qui faisaient la quintessence de l'imaginaire de la décennie. Ils n'ont peut-être, à leur niveau qui est celui du "divertissement", pas changé le monde, mais ils l'ont rendu plus supportable. Ceux chez qui le monde actuel n'est pas parvenu à éteindre complètement la capacité d'émerveillement de l'enfance savent ce qu'ils leur doivent et ne sont sûrement pas prêts de les oublier.

Stan WINSTON, un grand nom des effets spéciaux